Elle s’appelait Micha – Loli Artésia

Note : ★★★★★ (4.5/5)
Extrait : « Il y a autant d’avortements qu’il y a d’individus donc une femme a le droit tant d’en rire que d’en pleurer […] sans quoi ce serait oublier que ce sont autant d’histoires privées. »

Titre : Elle s’appelait Micha
Auteur : Loli Artésia
Genre : Drame, Poésie
Langue : Française
Pages : 142
Note : 4.5/5

En bref : Les poèmes ne sont pas mon genre de prédilection, je les trouve souvent obscurs et je reste hermétique à leur message. Ce ne fût pas le cas du recueil de Loli que j’ai trouvé poignant. Je l’ai même relu deux fois pour bien m’imprégner des émotions qu’il dégageait. Je le recommande autant pour les experts du genre que pour les non-initiés.

Résumé :

elle n’aura été
qu’un amas de cellules
qui se sera développé en moi
contre mon gré
rien pour personne
pas un individu
elle est pour toujours
celle que jamais personne ne blessera
celle qui jamais ne connaîtra
ce monde que je ne souhaite à personne

et pourtant
déjà
elle s’appelait Micha

Avis :

Fin septembre se tiendra le Salon des Plumes Indépendantes à Captieux. Au programme, entre autres, une table ronde sur les tabous. A ce sujet, trois auteurs seront présents : Loli Artésia, Erika Boyer et Antoine Delouhans avec respectivement les livres Elle s’appelait Micha, Pardon et Indomptables. Comme j’animerai cette table ronde avec la chroniqueuse Arkellana, il me fallait lire ces trois ouvrages. Me voici donc à lire ce recueil de poésie composé de 97 poèmes en vers libres. Il nous raconte l’histoire d’une femme qui décide d’avorter. Nous découvrons l’avant, le pendant et l’après avortement. Nous entrons dans la tête de cette femme qui subit aussi bien la pression de la société que celle de son entourage. Nous apprenons pourquoi elle a opté pour ce choix et les conséquences qu’il a eu par la suite.

Je ne suis pas une grande adepte de poésie, j’appréhendais donc ma lecture. J’avais peur de ne pas être réceptive aux mots de l’auteur, de ne pas comprendre le message qu’elle voulait passer, bref, de passer complètement à côté de cet ouvrage qui semble pourtant faire l’unanimité parmi les gens l’ayant déjà lu. Ce ne fût heureusement pas le cas et j’en suis ravie !
On rentre très vite dans le vif du sujet par deux poèmes qui nous exposent les deux avis sur le sujet. Ceux qui pensent que chacun devrait faire ce qu’il veut de son corps et qu’avorter est un signe de liberté, et ceux, pour qui avorter est pratiquement un crime. J’ai apprécié que l’auteur ne prenne pas position pour l’un ou pour l’autre, qu’elle nous montre même l’absurdité qu’il peut y avoir dans le discours de chacun. Ce qu’elle nous décrit, c’est une femme qui souffre et pour qui l’avortement semble être la seule solution pour garder ce qu’elle a de précieux autour d’elle.

J’ai suivi le parcours de cette femme avec beaucoup de curiosité et d’empathie. Le recueil est divisé en neuf mois et nous suivons son vécu durant cette période. Les mots et les structures utilisés sont simples et nous marquent tout de suite. Même si les émotions et les situations évoquées ne nous sont pas forcément familières, elles nous transportent et nous touchent quand même. J’ai dévoré les pages les unes après les autres et je n’ai pas vu le temps passé. Je l’ai même relu une deuxième fois dans la foulée pour être sûr de ne rien avoir raté et pour m’imprégner davantage de cette histoire bouleversante.

Bref, « Elle s’appelait Micha » est un recueil de poèmes qui vaut le détour. J’appréhendais ma lecture mais finalement je l’ai lu d’une traite tellement l’histoire de Micha m’a interpellé et touché. Les sujets abordés ne sont pas simples (avortement et dépression) mais ils sont importants à partager. C’est un témoignage percutant et sans jugement. Je le recommande aussi bien aux experts en poésie qu’aux non-initiés.